Lettre Hebdomadaire
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◀ Edito

Un éléphant, ça trompe énormément - fin

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Le 28 août 2023

  Babar sort de sa douche. Il est l’heure d’aller à ses deux rendez-vous. Il ne sait pas à quoi il pensait au moment d’envoyer ses messages à Shrek et à Sonic. Peut-être pensait-il qu’ils ne répondraient pas tous les deux, peut-être avait-il envie de se faire désirer. Il se rase. Une peau d’éléphant, ça s’entretient, ça se soigne et puis ça se regarde, ça s’admire. Il finit son rasage par un filet d’eau sur son visage pour écarter de la mousse en surplus, c’est aussi le secret de sa fraîcheur. Il enfile des vêtements, un manteau. D’abord, il verra Shrek, ensuite il verra Sonic en soirée.

  Arrivé au bar prévu pour le premier rendez-vous, Babar regarde les serveurs virevolter pour tenir la cadence des clients. Shrek semble légèrement en retard, Babar jette un coup d’oeil à sa montre agacé. Un jeune homme se tient devant Babar.

-Et vous êtes seul pour ce doux moment ? dit le jeune homme en approchant.

Babar est fortement gêné. Il vomit. Le jeune homme saisit une serviette pour venir en aide. Il tient la main de Babar tout en essuyant son coin de lèvre.

-Hé mais ! crie Shrek.

Shrek dévale sur le bar. Il attrape le jeune homme qui se rapprochait de la bouche de son rendez-vous, puis il le balance sur le trottoir comme un malpropre.

-Hé désolé de mon retard, je me préparais un peu, tu vois. Babar se reprend. -Pas de souci, je suis arrivé il y a cinq minutes, à peine.

Une fois installée, et la bouche de Babar rincée, ils ont pu poursuivre ce rendez-vous. Deux mojitos, et un bol de cacahuètes, de quoi rendre l’après-midi bien plus chouette.

-Et toi, tu fais quoi dans ton marais ?

-Tu faisais quoi comme travail ?

-Des choses comme-ci, comme-ça …


-Depuis combien de temps, tu le connais cet âne ?

A la fin de leurs conversations, deux cacahuètes se battent en duel dans leur bol. Babar et Shrek tendent tous les deux leur main pour les saisir. Au bord, leurs mains se percutent et - soudain - les regards se croisent. Les lèvres de Shrek se rapprochent.

Sur un toit du voisinage, Sonic, équipé de jumelles, observe ce rendez-vous arrivé malgré lui. Fou de jalousie, d’amour aussi, il les brise entre ses deux mains. Il se métamorphose en loup alpha prêt à déchiqueter ses cibles.

Shrek dépose ses lèvres sur celle de Babar. Qu’elles sont froides ! s’exclame l’ogre, surpris. Babar n’est certainement pas à son aise. Ce moment passé avec lui avait confirmé ses certitudes, il n’y a qu’une seule personne qui compte, c’est Sonic.
-Je m’excuse Shrek… Je…
-C’est lui, c’est ça ?
-Qu’est-ce que-
-C’est lui que t’aimes.
Babar essaye de ne pas fuir le regard de Shrek.
-Je comprends… Je peux pas vaincre l’amour.

Sonic vient de voir les deux s’embrasser. Il est décidé. D’abord, il tuerait Shrek en lui infligeant les pires atrocités. Ensuite, il tuerait avec sang froid Babar pour avoir joué avec son coeur.

Babar quitte le bar, accompagné de Shrek. Un peu de honte, un peu de gêne traînent dans l’air mais malgré tout, ils arrivent à se dire au revoir pour garder la tête haute chacun. Babar repart chez lui, pour préparer son rendez-vous avec Sonic.

Retourné dans son marais, Shrek solitaire allume quelques bougies en cire d’oreille. Il se pose dans son siège et souffle. Encore une fois, il sera seul cette nuit. Tiens ! Que c’est étrange, on dirait que… des meubles ont été abimés. Shrek se lève et fixe les étranges marques laissées. Des traces de griffes, comme si un animal féroce était venu se déchaîner dans sa maison. Les marques se poursuivent jusqu’à la porte arrière de la maison. Shrek s’en approche et - CRACK - la porte se brise sous la force enragée de Sonic alpha.

Shrek saisit une chaise et s’en sert de bouclier de fortune. Sonic alpha approche lentement en grogant.

-Sonic, c’est toi ?!
-grrrrr
-C’est pas ce que tu crois, t’as pas-

Sonic alpha découpe d’un coup de griffe la chaise et saute au coup de Shrek. L’ogre ne se laisse pas faire et attrape la gueule de Sonic et tire sur sa queue. Sonic pousse un cri puissant et approche lentement ses dents acérés de la gorge de Shrek.
La porte s’ouvre… l’âne est là.
-Hé Shrek, qu’est-ce tu fais ?
-Non ! l’âne, pars !
Sonic profite de l’inattention de Shrek pour se dégager de ses bras et fonce attaquer l’âne. -CHWOOP- d’une griffe, il découpe la tête de l’âne. Elle flotte dans la pièce en expulsant du sang.
-Nooooon ! l’âne :( !!!

Shrek dévasté tombe. Sonic alpha approche lentement de Shrek et l’achève d’un coup de patte violent sur la tête, écrasant sa cervelle.

Babar est rentré chez lui. Il écrit une lettre pour Sonic, qu’il donnera à son rendez-vous. Il regarde par sa fenêtre le soleil se coucher lentement. C’est la soirée, c’est le moment. Il entend sa porte s’ouvrir. Peut-être son fils ? Il signe sa lettre et s’empresse d’aller descendre. Au pied de son escalier, son fils est étendu, la gorge ouverte. L’oeuvre d’une bête, d’un monstre sans coeur. Babar se décompose en regardant son fils au brillant avenir, écroulé au bas de l’escalier. Derrière son corps, Sonic alpha se tient, impassible, d’un regard assassin. Babar ne comprend plus. Pourquoi lui ? Pourquoi ? Pour- Sonic vient de déchirer le corps de Babar en deux. Son buste vole jusqu’au dessus des escaliers alors que ses jambes descendent presque naturellement les marches.

Sonic monte les escaliers et arrive dans la chambre de Babar. Il regarde la fenêtre, le soleil est couché. Sur le bureau de Babar, il voit une lettre signé d’un “Pour Sonic”.

Il la lit :
Ce que je t’envoie, ce ne sont pas des grands écrits.
Je les ai comme sortis de ma tête pendant une nuit.

Tu sais, quand cette grande dame me fait la misère
Que ma tête endolorie s’écroule comme elle l’a faite hier
Hé bien… Je pense à toi et ta drôle de chevelure
Mes mains dans le vide plongent dans l’air
Et soudain, je me vois - contre le mur -
Enrouler, sur mes doigts, tes volutes épaisses
Sentir ton souffle et le toucher de mes caresses.
A mesure que mon doigt file, la branche s’épaissit
Ces volutes seraient-elles issues des racines de la folie ?
Oh, cette folie ne me fait pas peur
Elle est tendre, courbe et ondulante
On y plonge, en découvrant, puissantes
Les senteurs de ton parfum
Et les mystères en son sein.
Mais n’imagine pas que je pense qu’à cela
Tu es là, à te dire que je suis fétichiste déjà

Ce qui me peine le plus, c’est cet instant :
Celui où je retire mes lèvres des tiennes
Et que je te regarde - juste un moment - ;
Tes yeux qui veulent que je revienne ;
Le vert ne m’avait jamais paru si accueillant,
Alors je reviens, poser mon baiser – juste un moment -
Sur ta bouche au sourire merveille
Dans cette brume de vert et de vermeil.

Sonic redevient normal, sa queue disparaît, ses dents se rétractent. Il voit mieux maintenant. Il s’accoude à la fenêtre et regarde la Lune épouser les vagues de la mer. Les roches en contrebas de la fenêtre sont bousculés par les incessantes houles. Et maintenant, par le fracas du corps de Sonic qui vient de sauter.