Rififi en Téessedeu
Le 12 juin 2023
Il était une fois, dans la lointaine forêt de Brocéliande, un petit être appelé Toinou.
L’adjectif petit n’est ici qu’une litote affectueuse car Toinou mesurait 1m82 pour 67 kg. Cette ligne athlétique était due à un régime frugal couplé à une pratique intensive du parkour : en effet, le mode de vie de Toinou pouvait se résumer à se pinter la gueule à l’armagnac préalablement volé aux paysans du coin.
Grâce à sa paire de tire-bouchons magiques, il pouvait transférer le contenu du tonneau attaqué directement dans sa gorge au débit de 9 cL par seconde. Son sens inné de la droiture lui permettait de courir sans tituber avec 12 grammes dans le sang, ce qui faisait de lui un redoutable adversaire de la police sylvestre.
Au fil des ans et de sa dépression, la soif démesurée de Toinou lui avait valu de nombreux sobriquets, tels que le hoqueteux du bouleau, le siffleur de chêne ou le vide-fût. Mais son préféré restait Toinou des bois, détrousseur au grand foie.
Un jour de printemps, alors qu’il venait de spolier un paysan de ses liqueurs et qu’il rentrait passablement éméché à son logis, notre anti-héros chût élégamment dans un taillis de ronces. Faisant contre mauvaise fortune bon cœur, il entreprit de manger les mûres présentes avant qu’elles ne tâchent ses habits, car Toinou était un jeune homme soigneux.
Il se tortillait avec grâce pour échapper aux épines et attraper les dernières mûres quand son regard croisa celui d’un jeune paysan qui l’observait, partagé entre le rire et l’ennui. Il était moins grand que Toinou et ses cheveux châtains coupés court encadraient une mâchoire volontaire et des traits délicats. Ses yeux bleu glacier, froids de mélancolie mais pétillant d’esprit, étaient rivés dans les yeux azur du brigand que le jeune paysan jugeait.